dimanche 30 octobre 2016

Fruits et légumes : les meilleurs alliés anti cancer ?

Fin 2014, un hebdomadaire parisien faisait un dossier spécial sur l’alimentation. Son article principal s’intitulait : « Fruits et légumes : les meilleurs alliés anti cancer ». A l’appui de ses dires, l’hebdomadaire faisait état « de très nombreuses études » selon lesquelles les antioxydants, les fibres, les vitamines, que contiennent les fruits et légumes ont un effet protecteur avéré.

Les ANTIOXYDANTS sont les substances produites par les plantes pour se protéger des dommages dus à l'oxygène au cours de la photosynthèse. C’est pourquoi ils se concentrent dans les parties les plus exposées. Ce sont tous les polyphénols, les flavonoïdes, les caroténoïdes, les tanins...

Les FIBRES sont présentes dans les végétaux. Ce sont des glucides non digestibles. Certaines se gonflent d'eau, facilitant ainsi le transit intestinal en favorisant les contractions de l'intestin. Elles sont dégradées par le microbiote du gros intestin fournissant ainsi des nutriments que le système digestif ne sait pas extraire par lui-même. Elles favorisent la satiété en ralentissant la digestion.

Les VITAMINES sont des substances organiques apportées à doses infinitésimales par l'alimentation. Sans valeur calorique, elles sont essentielles à l'organisme notamment parce qu’en leur absence, les nutriments (glucides, lipides, protéines) seraient inutilisables.

Ces trois familles de nutriments essentiels sont présentes en quantité et en diversité dans les fruits et légumes. Pour n’en citer que les plus connus, ce sont les polyphénols, les flavonoïdes, les tanins présents dans des fruits, notamment dans leur peau. Il y a aussi les caroténoïdes, vaste famille de pigments végétaux comprenant les provitamines A, que l’on retrouve dans des légumes comme la carotte ou les épinards ou encore dans les tomates sous forme de lycopène. Citons encore les anthocyanates des choux, des broccolis ou de la roquette, les allicines et allinases des ails, oignons ou échalottes, le resvératrol du raisin, des mûres ou du cassis, etc. ... La liste est loin d’être exhaustive, d’autant plus qu’il en reste à découvrir. La plupart de ces substances sont fragiles et ne supportent pas la chaleur. Certaines sont même produites lors de la consommation de la plante. C’est le cas par exemple des anthocyanates qui sont issus de la transformation des glucosinates au contact des myrosinases, une autre enzyme de la plante, grâce à la mastication. Or ce sont justement ces anthocyanates qui ont des propriétés antioxydantes et anti-cancer. Mais pour en bénéficier encore faut-il éviter la cuisson ou la congélation que ne supportent pas les myrosinases.

Bien d’autres composants spécifiques et d’autres interactions restent à mettre en évidence pour comprendre les effets protecteurs des fruits et légumes. Toutes les études le montrent. Les fruits et légumes sont indispensables. C’est la raison pour laquelle les recommandations insistent sur la nécessité d’en consommer quotidiennement.

Le sucre est la cause du problème

Il existe cependant des régimes thérapeutiques qui excluent les fruits au motif qu’ils sont sucrés. C’est encore le cas pour le diabète, c’est aujourd’hui le cas pour les cancers. Dans les deux cas le raisonnement est le même. Le sucre est une cause identifiée du problème, la solution est de le supprimer de l’alimentation. A priori, ce raisonnement semble logique. Pour le diabète, pathologie due à un trouble de l’assimilation des sucres apportés par l’alimentation, il s’agit d’éviter l’hyperglycémie. Pour le cancer, la raison est la suivante : les cellules cancéreuses sont dévoreuses de sucre. Cette propriété, connue depuis près d’un siècle, est d’ailleurs utilisée pour détecter les cellules cancéreuses au scanner grâce au glucose radioactif injecté comme produit de contraste. D’où l’idée promue par certains oncologues « d’affamer » le cancer en le privant de sucre. Pour cela, ils prescrivent un régime alimentaire basé sur la consommation quasi exclusive de graisses : le régime cétogène. Le but de ce régime est de mettre l’organisme en « cétose », c’est-à-dire obliger le foie à produire des cétones à partir des graisses. Tout comme le sucre, les cétones sont utilisables par les cellules de l’organisme pour produire l’énergie dont elles ont besoin, sauf pour les cellules cancéreuses qui ne brulent que le sucre. Le régime cétogène considère que toutes les graisses à l’exception des graisses hydrogénées peuvent être consommées sans restriction, qu’elles soient transformées ou pas. Cela inclut des graisses animales telles que la crème, le beurre, les fromages ou les charcuteries et des graisses végétales telles que les huiles ou les margarines. Bien qu’il recommande une alimentation peu transformée, le régime cétogène attache peu d’importance à la qualité des graisses. C’est un régime très dur, très frustrant. En effet, d’une part les aliments gras sont peu gouteux, d’autre part nous sommes génétiquement attirés vers les aliments sucrés. Dans le contexte préhistorique, cette attirance permettait d’identifier dans la nature les végétaux et les fruits qui correspondent aux besoins de nos organismes. Ce guidage sensoriel assurait un apport de nutriments variés indispensables à la pérennité de notre espèce. Aujourd’hui, elle nous pousse à surconsommer des produits alimentaires que l’on sucre abondamment justement pour satisfaire cette attirance naturelle. Le régime cétogène ne fait pas de distinction entre les sucres de l’alimentation transformée et ceux contenus dans les végétaux et les fruits tout simplement parce que ce régime repose sur des études scientifiques qui ne font pas cette distinction. Or tous les sucres ne se valent pas. Des études récentes ont montré que l’assimilation du fructose des fruits diffère selon qu’ils sont consommés entiers ou transformés en jus ou en purée. Dans le premier cas, le fructose arrive dans la bouche au contact de la salive empaqueté dans des fibres, ce qui permet au système digestif de contrôler la libération du fructose dans le sang. En revanche, dans le second cas, la transformation casse cette protection et le fructose est immédiatement libéré dans le sang comme s’il s’agissait de sucre blanc, obligeant l’organisme à produire de l’insuline. C’est pourquoi les diabétiques peuvent manger des fruits entiers mais doivent absolument éviter les jus ou les smoothies, même faits maison. Bien que la démonstration scientifique n’ait pas encore été faite pour ce qui est du cancer, il est possible qu’il y ait lieu de considérer différemment fruits entiers et autres sources de glucose. En effet, la glycémie à jeun des personnes qui mangent beaucoup de fruits non transformés est tout à fait normale et même plutôt proche de la limite basse de la fourchette. Un taux bien en deçà des valeurs habituellement constatées avec le régime standard. Rien d’étonnant à cela car le régime standard est très riche en glucoses. Il y en a partout, même dans les charcuteries. Dans ces conditions, il est tout à fait possible que l’apport en fructose naturel n’ait pas les inconvénients qu’on lui prête et que l’apport de nutriments essentiels donne un avantage décisif à la consommation des fruits. Contrairement au régime cétogène qui impose au corps des quantités de graisses qui peuvent se révéler excessives, le crudivorisme sensoriel est à l’écoute du corps et de ce fait n’engendre ni frustrations, ni déséquilibres nutritionnels sur le long terme. D’ailleurs cette pratique alimentaire ne se résume pas à la consommation de fruits. Elle peut même être suffisamment riche en lipides pour que l’organisme se mette en cétose. Il suffit pour cela de mettre régulièrement au menu des avocats, des noix de coco, des œufs, des oléagineux, des poissons gras tels que les sardines, le maquereau, le saumon sauvage, etc.

Le crudivorisme sensoriel : un régime optimum ?

Pour conclure, s’il est vrai que les fruits sont une source de fructoses susceptibles de nourrir des tumeurs cancéreuses, ils sont aussi riches en nutriments essentiels. S’en priver pour contrer une pathologie peut se révéler dommageable. Par ailleurs un régime alimentaire ne peut durablement se baser sur une seule catégorie d’aliments sans entrainer de lourds déséquilibres. Le crudivorisme sensoriel apporte une réponse élégante à ces considérations diététiques en donnant le dernier mot à votre propre corps. En vous laissant simplement guider par le plaisir de manger ces nourritures naturelles vous êtes naturellement amené à consommer tous les types d’aliments sans avoir à craindre carences ou excès.


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