vendredi 27 octobre 2017

Guerres ou Paix : Le sort des générations futures dépend de nos choix alimentaires

Comme j’ai eu l’occasion de l’écrire sur ce blog dans des articles précédents, l’utilisation excessivement limitée de la biodiversité dans l’alimentation met en péril l’avenir de nos sociétés.

Pour rappel dans un rapport de 2001, la FAO faisait état de l’utilisation de seulement 3 plantes pour couvrir plus de la moitié des besoins alimentaires de l’humanité. Un autre rapport, toujours de la FAO, datant de 2010, introduisait son propos par ces mots : « La diversité génétique des plantes que nous cultivons et consommons -- et des espèces sauvages apparentées -- pourrait disparaître à jamais, compromettant ainsi la sécurité alimentaire future, à moins que des efforts extraordinaires soient déployés non seulement pour préserver la biodiversité mais aussi pour l'utiliser, plus particulièrement dans les pays en développement. » Cette année (2017) un autre rapport, issu cette fois de la Banque Mondiale confirme les affirmations des précédents rapports. Volumineux, il rassemble les travaux de 40 chercheurs. Selon ce dernier rapport, 75% de l’alimentation mondiale repose sur une douzaine de plantes et 5 espèces animales.

J’ai saisi l’occasion offerte par les Etats Généraux de l’alimentation pour m’exprimer sur cette actualité peu médiatisée. L’abondance des supermarchés nous trompe. Regardez-y de plus près et vous constaterez combien votre alimentation quotidienne est centré sur un nombre limité de plantes et d’espèces animales. En tant que consommateur vous avez le pouvoir de changer cela. En tant que citoyen vous pouvez interpeler vos élus afin qu’ils s’emparent de ce sujet. A défaut, l’avenir de l’humanité trébuchera de crise alimentaire en émeutes de la faim et conflits meurtriers.

Je vous invite à lire ma contribution aux États Généraux de l’Alimentation, à la commenter et à la partager sur les réseaux sociaux, via le lien ci-dessous :

 Plus de la moitié de l’alimentation humaine repose sur seulement 3 plantes. Faute de restaurer la biodiversité alimentaire, la sécurité alimentaire de 10 milliards d’êtres humains ne pourra être assurée et des conflits majeurs éclateront

dimanche 30 avril 2017

Enquête « Vous et votre alimentation »

Ce blog existe depuis plus de 8 ans. Tout au long de ces années, son audience n’a cessé de grandir. Une progression due à la pertinence des publications mensuelles ? Peut-être, mais peut-être aussi liée à un intérêt croissant pour le cru de la part des internautes. Intérêt ou curiosité qui fait écho aux inquiétudes sur nos modes de consommation moderne dont les méfaits, tant pour la santé que pour l’environnement sont de plus en plus évidents.

Mais qui êtes-vous, visiteurs réguliers ou occasionnels de ce blog ? Mieux vous connaitre nous permettrait sans doute de mieux répondre à vos attentes. Aussi nous vous proposons de vous exprimer en répondant à notre enquête anonyme : « Vous et votre Alimentation ». Au fil de quelques questions, nous vous invitons à nous dire vos inquiétudes sur l’alimentation en général, sur la vôtre en particulier, sur ce qui vous motive à en changer ou qui au contraire vous freine à le faire.

Pour accéder l’enquête cliquez sur le lien suivant : Enquête "Vous et votre alimentation"

mercredi 29 mars 2017

Les fruits nous ont-ils donné un cerveau plus gros ?

Les singes et les humains ont cette particularité que nous ne retrouvons pas chez les autres espèces animales : ils ont un cerveau volumineux et performant. Depuis longtemps les scientifiques s’interrogent sur cette spécificité. Qu’est-ce qui a pu conduire à une telle augmentation au cours de l’évolution ? Jusqu’à présent, certains l’attribuaient au fait de vivre en groupe, d’autres, comme Pascal Pick, à la consommation de viande. Une publication de la revue scientifique Nature Ecologie & Evolution en date du 27 mars 2017, vient bouleverser ces hypothèses et propose une explication inattendue : la consommation de fruits.

En effet, dans cette étude, l’anthropologue Alex Decasien et ses collègues de l'Université de New York ont analysé le régime alimentaire de plus de 140 espèces de primates non humains. En tenant compte de divers facteurs tels que la taille du corps, la position dans l’échelle de l’évolution, les habitudes sociales, etc., l’équipe a pu mettre en évidence une taille du cerveau supérieure de 25% chez les espèces qui consomment le plus de fruits.

On le sait, le cerveau est l’organe qui consomme le plus d’énergie. Alors qu’il ne représente que 2% du poids de notre corps, il absorbe 25% de notre énergie. Or les fruits sont les ressources les plus énergétiques disponibles dans la nature. Ils assurent aussi un apport nettement plus important en nutriments que les tiges et les feuilles. Ils sont en revanche saisonniers donc moins disponibles, moins prévisibles dans le temps et dans l’espace. En milieu sauvage, les primates doivent parfois se déplacer sur de longues distances pour se les procurer. Par ailleurs, l’accès à ces ressources met parfois en jeu des tâches complexes comme, par exemple, celles de choisir des pierres adaptées pour casser des noyaux ou des noix sans écraser ce qu’elles contiennent. Il faut faire preuve de perspicacité pour trouver ces ressources et les exploiter correctement. Autant d’activités qui interagissent avec le néocortex et participent au développement du cerveau.

Mais pour qu’une telle évolution ait pu s’amorcer, il a fallu des circonstances particulières, car tous les animaux n’ont pas pris le même chemin évolutif. Il a fallu que les lointains ancêtres des primates aient eu une appétence pour le sucré. Une telle appétence n’a rien d’universel. Elle n’existe pas chez les carnivores qui ne ressentent pas le goût sucré. C’est sans doute cette disposition particulière alliée à la pression écologique qui a façonné au cours de plusieurs centaines de millénaires, non seulement le cerveau mais aussi un système digestif adapté à la consommation des fruits. S’ils sont aujourd’hui reconnus comme d’excellents aliments c’est précisément parce que cette adaptation a été optimisée au maximum. Nous nous sommes constitués en symbiose avec eux.

Cette étude suggère que les fruits ont dû jouer un rôle primordial dans notre humanisation, reléguant sans doute loin derrière celui de la consommation de viande, intervenue plus tardivement et éliminant définitivement celui de la cuisson longtemps mis au premier plan. Il n’est pas inutile de rappeler que celle-ci s’est soldée par l’apparition des maladies et des guerres. Cela suggère que cette cuisson qui a permis aux céréales de détrôner les fruits, apporte des sucres qui ne sont pas aussi bien adaptés à notre physiologie. Elle a aussi eu pour effet de réduire drastiquement la diversité des ressources alimentaires. Aujourd’hui plus de la moitié de l’alimentation humaine à l’échelle mondiale repose sur 3 céréales : le blé, le riz et le maïs. C’est ainsi que notre planète s’est couverte de ces déserts de biodiversité que sont les immenses monocultures céréalières.


Primate brain size is predicted by diet but not sociality
 
La grosseur du cerveau humain, résultat de la consommation de fruits
 
Pascal Picq : "La cuisson nous a donné un cerveau plus gros"
 
Ce que mangeaient nos ancêtres...
 
Sur la biodiversité alimentaire

mardi 28 février 2017

L’énigme du litchi tueur d’enfants

Cette nouvelle n’a pas fait la une de l’actualité dans l’hexagone, peut-être même ne l’avez-vous pas remarquée. Elle n’est pourtant pas anodine pour ceux qui mangent beaucoup, voire exclusivement cru. Début février, en effet, plusieurs journaux et magazines ont relayé un article paru dans The Lancet Global Health, la référence mondiale en matière de publication scientifique médicale. Un article qui nous apprend cette surprenante découverte : Des toxines présentes dans le litchi provoquent chaque année des épidémies d’encéphalopathies infantiles. L’article est paru le 30 janvier 2017, dès le 2 février, le monde titrait « En inde : L’énigme résolue d’une maladie mortelle » et l’Express était encore plus alarmant avec cette une : « Le litchi, cause d'une maladie tueuse d'enfants qui sévit en Inde depuis 20 ans ? »

Depuis une vingtaine d’années en effet, des enfants meurent d’encéphalopathies foudroyantes, toujours à la même période de l’année, entre mai et juillet, dans l’état du Bihar en Inde. Chaque année, c’est une véritable épidémie qui touche des centaines d’enfants et provoque la mort de 44% d’entre eux. Une équipe de scientifiques de l’institut Pasteur et du National Centre for Disease Control de Delhi a passé au peigne fin toutes les hypothèses. Pas d’infection bactérienne ou virale, les examens biologiques sont formels. Pas de trace non plus de pesticides ou d’une quelconque pollution. Finalement après des années de recherche et la découverte de précédents similaires en Jamaïque, c’est bien une toxine présente naturellement dans le fruit qui est à l’origine de cette maladie.

« Comment est-il possible que le litchi, ce délicieux fruit tropical sucré, puisse provoquer une encéphalopathie hypoglycémique chez les enfants ? ». C’est par ces mots que commence l’article du Lancet et c’est aussi ce qui nous consterne tant cela contredit les principes de l’alimentation sensorielle. Des aliments comestibles qui contiennent des composés toxiques, ce n’est pas une nouveauté. C’est le cas, par exemple, des épinards qui contiennent une molécule qui attaque les reins. Habituellement, lorsque ces aliments sont consommés crus, sans assaisonnement ni mélange, les signaux d’alertes envoyés par le système sensoriel sont suffisamment clairs pour empêcher l’intoxication. Le goût et les sensations en bouche virent au désagréable voire au douloureux dès que l’organisme n’est plus en mesure de faire face. Pourquoi cela ne s’est-il pas produit chez les jeunes indiens ? Car le litchi n’est pas dépourvu de ces signaux d’alertes sensorielles. Lorsqu’ils se manifestent, la pulpe fruitée s’affadit et devient astringente. Si les scientifiques ne se posent pas la question en ces termes, ils s’en posent d’autres, notamment celle de l’inégalité des enfants face à cette maladie. En effet, ils ont remarqué que certains d’entre eux n’avaient aucun symptôme quand d’autres moins exposés tombaient malades. Ils se demandent dans quelle mesure le patrimoine génétique ou la malnutrition pourrait expliquer cette inégalité.

Si, de l’avis des médias, l’énigme est résolue, sa résolution en soulève de nouvelles. Celle qui nous interpelle n’est malheureusement pas celle qui intéresse les scientifiques. Il y a certainement de bonnes raisons pour que les signaux d’alertes sensorielles n’aient pas été suffisamment persuasifs pour ces enfants. Est-ce la variété de litchis cultivée dans cette région de l’inde qu’une sélection trop poussée aurait trop éloigné de son origine sauvage ? En effet, les techniques d’obtention variétales créent des cultivars qui, souvent, atténuent les signaux d’alertes qui sont un frein pour la consommation. Il se peut aussi que cela provienne d’un mode de culture industriel qui provoque un appauvrissement nutritif. Ainsi, par exemple, en 1950, une orange contenait autant de vitamine A que 21 aujourd’hui. Sélection ? Mode de culture ? Les litchis ont-ils subis la même érosion nutritionnelle ? Pour importante qu’elle soit, cette perte des signaux d’alertes n’est peut-être pas la seule cause de ces épidémies. D’autres facteurs comme, par exemple, la malnutrition ou le patrimoine génétique ont pu jouer un rôle décisif. Le saurons-nous un jour ? Espérons le car la résolution de cette nouvelle énigme devrait être riche d’enseignements pour la pratique d’une alimentation crue.


L’Express : Le litchi, cause d'une maladie tueuse d'enfants qui sévit en Inde depuis 20 ans

En Inde, l’énigme résolue d’une maladie mortelle

The Lancet Global Health : The enigma of litchi toxicity: an emerging health concern in southern Asia

Appauvrissement nutritif des aliments

lundi 30 janvier 2017

Etre à l'écoute de son corps

Comment se débrouillaient les humains en ces temps reculés de la préhistoire pour survivre ? Il y a de cela environ 250 millénaires, nos ancêtres homo-sapiens quittaient les régions chaudes de l’Afrique pour s’installer dans les régions septentrionales d’Europe. Comment ont-ils pu s’adapter à ces environnements totalement nouveaux pour eux ? Comment ont-ils fait pour y trouver leur subsistance ? Comment ont-ils pu identifier les plantes comestibles, celles qui soignent, celles dont il faut se méfier ? Ces questions nous interpellent, nous qui serions sans doute fort démunis si d’aventure nous devions nous débrouiller pour survivre dans une forêt. Certes les forêts d’Europe, telles que nous les connaissons aujourd’hui n’ont plus rien de commun avec ce qu’elles étaient au paléolithique. Leur biodiversité est bien pauvre en comparaison de celle des forêts primaires encore épargnées dans le monde. Néanmoins, qui d’entre nous se sent capable de survivre dans la jungle amazonienne ? Pourtant, à en croire ce que nous ont révélé l’étude de leurs restes, ils ne vivaient pas mal ces humains de la préhistoire. Ils étaient même en bonne santé et de bonne constitution, ce qui prouve qu’ils avaient parfaitement su tirer avantage de leur environnement. Comme les animaux, ils savaient d’instinct s’ils préféraient ce fruit ou cette baie, si c’est plutôt un poisson de la rivière qui ferait leur bonheur ou ces champignons.

La tête pleine d’images publicitaires et de préceptes alimentaires parfois contradictoires, nous avons peu à peu perdu cette faculté naturelle, d’autant plus que l’industrie agro-alimentaire fait tout pour tromper nos sens. Tels les papillons attirés par la lumière, nous nous ruons sur ses produits qui provoquent le plaisir immédiat de nos papilles au détriment des besoins véritables de notre corps. Aujourd’hui il nous est de plus en plus difficile de faire la différence entre des envies impulsives dictées par nos émotions et de réelles appétences de notre organisme. A l’heure où nous faisons communiquer des objets entre eux, nous ne savons plus communiquer avec notre propre corps.

Heureusement, il n’y a rien d’irrémédiable à cela. Quelques siècles de modernité ne sauraient effacer définitivement des millénaires d’évolution darwinienne. Notre capacité à identifier quels aliments sont bon pour notre corps et pas seulement pour notre palais est toujours là. Il suffit de la réactiver. C’est ce que propose Dominique Guyaux, auteur du livre l’Eloge du cru, lors de week-end « d’initialisation sensorielle » dont l’objectif est de « réhabiliter la puissance sensorielle qui est en vous pour la mettre au service de votre fonction alimentaire ». Un week-end pour comprendre comment notre corps nous parle et comment l’écouter.

Week-end d’initialisation sensorielle